
Pop-croc et musique pour chats
Les crocodiles sont capables de distinguer la musique classique et des sons aléatoires. Les neuroscientifiques de l’université de la Ruhr, en Allemagne, ont pu le constater sur les scanners cérébraux de crocodiles qui écoutaient le Concerto Brandebourgeois n° 4 de Jean-Sébastien Bach. Mais les reptiles ont-ils apprécié l’expérience ?
Cerveau de crocodile
Pourquoi des chercheurs ont-ils mis des crocodiles dans un appareil d’IRM avant de leur faire écouter du Bach ? Pour distinguer une musique de bruits d’accords aléatoires, un cerveau doit pouvoir reconnaître des schémas complexes. Ce qui n’est pas donné à tous les animaux. Nous savons déjà que c’est à la portée des oiseaux et des mammifères. Mais quid des crocodiles ?
Les crocodiles existent depuis très longtemps, plus précisément depuis 200 millions d’années avant la musique classique. Et ils ont à peine évolué depuis lors. L’étude de leur cerveau permet de dater certaines propriétés cérébrales, comme la reconnaissance de schémas complexes. Grâce à ces recherches, nous savons aujourd’hui que cette compétence est très ancienne et que tous les vertébrés la possèdent.

Fans de musique ?
Cela ne répond cependant pas à la question la plus importante. Les animaux reconnaissent notre musique, mais qu’en pensent-ils ? Comme souvent, les scientifiques sont divisés sur le sujet. En 2001, une étude britannique a démontré que les vaches qui écoutaient de la musique classique produisaient plus de lait. Est-ce la preuve de leur goût pour la musique ? La plupart des études le contestent. Les animaux n’aiment pas notre musique. Une étude japonaise a par exemple démontré que les rats dédaignent Mozart. Les chimpanzés du zoo d’Édimbourg sont parfaitement imperméables aux notes de Mozart, Beethoven, Adèle ou encore Justin Bieber.
Charles Snowdon, professeur de psychologie à l’université du Maryland, n’est pas d’accord. D’après lui, les études partent d’un mauvais postulat. Les rats ignorent d’office tous les bruits sous les 4 000 hertz. La quasi-totalité du répertoire musical humain est donc sans intérêt pour eux. De plus, les chercheurs considèrent que la musique classique est « universelle ». C’est faux ! Notre musique n’est pas la musique des rats et des singes.
Mélodies félines
Dès lors, le Pr Snowdon a décidé de mener des expériences avec des musiques spécialement conçues pour les animaux. Il a choisi de composer de la musique pour chats, avec un tempo et une tonalité adaptés. Les chats vocalisent une octave au-dessus des humains et ils préfèrent les sons qui suivent le tempo de leur ronronnement. Le psychologue a diffusé sa musique chez 47 propriétaires de chats et a observé le comportement des petits félins. Ensuite, il a répété l’expérience avec de la musique classique.
Des bêtes de hits
Comme prévu, les chats ont affiché une réaction beaucoup plus rapide et positive à « leur » musique. Ils sautaient sur les enceintes et s’y frottaient la tête. Leurs réactions étaient néanmoins très lentes, n’intervenant en moyenne qu’au bout de deux minutes. La plupart des chats dormaient au début de l’expérience et ont pris tout leur temps pour se réveiller. Le Pr Snowdon a reproduit l’expérience avec des singes et est parvenu à la même conclusion.
Le pop-croc n’est pas près d’envahir les ondes. Et nul ne sait si les crocodiles apprécient la musique. Y a-t-il un compositeur dans l’assistance pour aider la science ?
Cet article est d’abord paru dans le livre « Giraffes don’t sink » (éditions Houtekiet). Kim Verhaeghe, rédacteur chez Eos Wetenschap, y a compilé 138 découvertes scientifiques et fantastiques. Un livre que vous aurez du mal à lâcher !
Sources: