
Intelligence artificielle au XVIIIe siècle ?
Battant les plus grands maîtres les uns après les autres, un automate joueur d’échecs a fait grand bruit au XVIIIe siècle. Mais s’agissait-il d’un brillant robot automatisé — bref, d’un précurseur de l’IA — ou de toute autre chose ?
En 1770, Wolfgang von Kempelen éblouit littéralement la Cour de Vienne. Désireux d’impressionner l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche, l’inventeur lui présente « le Turc mécanique » : un automate joueur d’échecs contre lequel — contre toute attente — tous les adversaires du jour s’avouent perdants.
Le Turc
L’automate se compose d’un coffre en bois, derrière lequel trône un mannequin grandeur nature portant des vêtements ottomans et un turban. D’où son nom : le Turc mécanique. À la surface du coffre, on trouve un échiquier et ses pièces et, à l’intérieur, d’innombrables rouages qui permettent à l’automate de déplacer les pièces.
La nouvelle de l’automate intelligent se répand à grande vitesse. Tous veulent l’affronter, si bien que le Turc mécanique part en tournée. Au fil de ses escales, l’automate joue contre de nombreuses célébrités, comme Benjamin Franklin, Napoléon Bonaparte et Charles Babbage, l’inventeur de l’ancêtre de l’ordinateur. Le Turc l’emporte à tous les coups.

IA au XVIIIe siècle ?
Une machine qui pense et agit comme un être humain, ça ressemble à de l’intelligence artificielle (IA) au XVIIIe siècle. Mais bon nombre de scientifiques ont des doutes. Ils essaient donc de percer le secret de la machine, mais le Turc est si bien conçu qu’il est difficile de démontrer l’une ou l’autre des théories.
Il faudra attendre 1836 pour que l’écrivain Edgar Allan Poe évoque une supercherie dans un essai. Il suggère la présence d’un homme de petite taille à l’intérieur du mannequin. Plus tard, il s’avérera effectivement qu’il y avait un homme dans la machine. Non pas dans le mannequin, mais dans le coffre en bois. Le mécanisme complexe de la machine servait de cachette à un joueur en chair et en os. Les enquêteurs ont aussi trouvé des aimants reliés à l’échiquier, pour que le vrai joueur humain puisse suivre les coups joués.
Superordinateur
Suite à cette révélation, le public perd tout intérêt pour le Turc mécanique. Il finit par atterrir dans un musée américain, où il disparaîtra dans un incendie en 1854.
Plus de 200 ans après l’invention de Wolfgang von Kempelen, l’incroyable devient vrai : en 1997, le superordinateur Deep Blue bat Garry Kasparov, alors champion du monde d’échecs. Ce n’est donc pas le Turc mécanique, mais bien Deep Blue qui marque un tournant dans l’histoire de l’intelligence artificielle.
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