
Est-il possible d’enregistrer votre playlist préférée dans votre ADN ?
Cela pourrait bien devenir une réalité ! Des généticiens et des informaticiens ont uni leurs forces et ont découvert le potentiel de notre matériel génétique en tant qu’espace de stockage numérique.
Nos milliards d’activités et interactions sur Internet produisent des données. Des tonnes de données. Pour enregistrer toutes des données, actuelles et futures, nous aurons besoin de toujours plus de bandes magnétiques, de disques durs et de mémoires flash. Sans parler des nombreux centres de données et entrepôts supplémentaires, indispensables pour conserver tous ces supports. Cela semble impossible, sur le plan tant technique qu’économique. C’est pourquoi les scientifiques cherchent d’autres, et meilleures, solutions de stockage.
L’ADN à la rescousse
La solution à notre problème de stockage pourrait bien se trouver dans notre ADN. Parfois appelé « la plus vieille mémoire de la nature », l’ADN contient toutes les informations nécessaires pour constituer et entretenir un organisme.
Chacune de nos 30 billions de cellules renferme de l’ADN. Qui enregistre à chaque fois des caractères sous la forme de paires de bases. Chaque cellule humaine contient quelque 3 milliards de paires de bases. Une quantité énorme, donc ! Mais, dans notre corps, ce volume gigantesque n’est enregistré que sur une petite partie de chaque cellule : le noyau. Difficile de faire plus compact.
Une boîte à chaussures de données
L’ADN a en outre une durée de vie incroyablement longue. Il a une demi-vie de 521 ans — ou, autrement dit : il faut cinq siècles pour que la moitié des données soit usée au point d’être inutilisable. Dans les conditions adéquates, il peut même survivre des centaines de milliers d’années. Comment le sait-on ? Parce qu’on a déjà retrouvé de l’ADN d’hommes de Néandertal (datant de +/- 400 000 ans), d’un cheval préhistorique (datant de +/- 700 000 ans) et même de mammouths (datant de +/- 1,2 million d’années) et qu’on a pu le reconstruire.
En résumé : l’ADN a le potentiel d’enregistrer un très grand volume d’informations, sur un super très compact et pendant très longtemps. Si nous parvenons à enregistrer des données dans l’ADN, toutes les informations stockées dans un centre de données tiendraient sans problème dans une boîte à chaussures et pourraient encore être consultées dans 100 ans.
Comment faire ?
Nous savons que tous les échanges informatiques sont binaires (formés de 0 et de 1) et que l’ADN se compose de quatre bases (A, T, C & G). Cela signifie donc que nous pouvons traduire toutes les valeurs binaires en un « code de bases », par exemple A = 00, T = 11, C = 01 et G = 10. « 110001010010 » est donc la transposition binaire de « TACCAG ».
Une fois la « traduction » effectuée, il est possible d’imprimer les bases en laboratoire pour former de l’ADN de synthèse. Qui peut ensuite être conservé en sécurité (dans des tubes à essai, sur des lames de verre, etc.) afin de pouvoir être ressorti plus tard et reconverti pour retrouver les valeurs binaires d’origine, qu’un ordinateur pourra à nouveau traiter.
Et ça fonctionne ?
Il y a quelques années, des scientifiques sont parvenus à enregistrer la chanson « Smoke on the Water », du groupe Deep Purple, dans des brins d’ADN artificiels. Ces brins auraient ensuite été décodés avec une fiabilité de 100 %.
Mais ne nous emballons pas, la route est encore longue. Bien que les brins aient pu être lus correctement, le prochain défi pour les biotechniciens consiste à n’y retrouver que quelques fragments spécifiques d’infos, par exemple le solo de guitare. Sans oublier les inconvénients de l’actuelle synthèse de l’ADN, qui est un processus lent et encore très coûteux.
Mais — comme pour toutes les technologies — ce processus va s’accélérer et se démocratiser au fil des recherches et des avancées technologiques. Quant à nous, nous préparons déjà notre boîte à chaussures !